Toujours aussi insaisissable et flamboyant, l’anglais Richard Dawson livre avec End Of The Middle un nouvel album somptueux.

S’il livre aujourd’hui son huitième album studio, l’auteur-compositeur-interprète novocastrien – c’est ainsi que l’on nomme les habitants de Newcastle où naît Richard Dawson en 1981 – mène une carrière discrète bien que remarquable, son absence de notoriété pouvant peut-être s’expliquer par la difficile catégorisation de sa musique et son caractère expérimental.

À l’instar de ce que Captain Beefheart a fait avec le blues aux Etats-Unis, Richard Dawson, en digne héritier de Robert Wyatt, déconstruit la musique folk anglaise afin d’offrir des disques-ovnis. Même si, par souci de simplification, on parle à son sujet de folk progressif, l’importance de la narration chez Richard Dawson – chaque disque est une histoire – le relie à la tradition des troubadours, à la différence près qu’il est un troubadour attaché à l’expérimentation.

Le caractère hybride des compositions de Richard Dawson a atteint son apogée en 2021, avec le génial Henki, album aux envolées heavy metal écrit en collaboration avec le groupe finlandais Circle et dont le thème est la botanique et les plantes. Suivie une monumentale trilogie racontant une histoire de l’Angleterre partant du VIᵉ siècle jusqu’à un avenir apocalyptique, trilogie conclue en 2022 par The Ruby Cord.

En comparaison, la sortie aujourd’hui de End Of The Middle, un disque moins expérimental, plus accessible, plus intimiste, offre l’impression d’une sorte d’apaisement. Peut-être. Mais ce nouvel opus n’en est pas moins passionnant.

End Of The Middle 2

© Sally Pilkington

En partie composé dans un abri de jardin et enregistré avec Sam Grant, guitariste du groupe de hard rock Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs, habituel producteur de Richard Dawson, End Of The Middle est, comme ses prédécesseurs, un album conceptuel dressant, à travers les époques et les générations, le portrait d’une famille anglaise en pleine crise, et par là même un tableau édifiant du Royaume-(dés)Uni. 

L’histoire que raconte Richard Dawson est celle, banale, d’une famille anglaise issue de la classe moyenne : des émissions TV abrutissantes, des courses au Lidl, un passage au magasin de bricolage. De chanson en chanson, on rencontre les membres de la famille, comme Jen, qui se lance dans la natation synchronisée dans Boxing Day Sales, puis passe son permis de conduire dans Gondola. Pour écrire cette famille, Dawson s'est inspiré des films du japonais Yasujirō Ozu, cinéaste de la famille et des relations intergénérationnelles par excellence. C’est simple, commun, et pourtant bouleversant.

Musicalement aussi, End Of The Middle prône une forme de simplicité folk : une batterie élémentaire tenue par Andrew Cheetham, une surprenante et aléatoire clarinette jouée par Faye MacCalman, membre du groupe de jazz Archipelago, basé à Newcastle, et quelques notes de synthé suffisent à rendre poignant chaque titre, jusqu’au superbe final More Than Real où la guitare acoustique disparaît pour céder la place à un synthétiseur discordant, tandis qu’une voix féminine accompagne celle de Richard Dawson, comme pour entamer une autre histoire et faire de End Of The Middle un classique.

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