En 1837, Rosalie, 14 ans veut gagner sa vie en vendant des tableaux. La jeune fille ne vit que pour sa passion et n’a qu’une idée en tête : devenir une peintre animalière célèbre et reconnue.
Il semble, dans le Paris du XIXe siècle, difficile pour la demoiselle de mener a bien son dessein sachant qu’à cette époque, l’école des Beaux-Arts est exclusivement réservée aux garçons. Son père Raimond Bonheur lui-même portraitiste, connaît les difficultés du milieu et décide de l’inscrire à un cours de couture. Décidée à être autonome et indépendante, Rosa (surnom que lui donnait sa mère Sophie décédée quelques années auparavant) clame haut et fort que sa vie c'est son art et sûrement pas les aiguilles et encore moins le mariage. Pour être libre et véritablement heureuse, la jeune fille doit montrer sa totale et entière détermination. Par un heureux hasard, la rencontre de la famille Micas pour la réalisation du portrait de leur fille Nathalie, Raimond finit par se laisser convaincre. Suivant les encouragements du couple, il devient le professeur de sa fille et de sa nouvelle et très chère amie Nathalie, elle aussi fascinée par la peinture. En enseignant à ses deux élèves, Raimond évalue très vite le potentiel et reconnaît le talent évident de sa progéniture.
Toujours, à contre-courant, Rosa choisit la peinture animalière (elle a appris l’alphabet avec sa mère en dessinant des animaux) qui n’est pas en vogue, ni à la mode à cette époque. Parcourant les galeries du Louvre pour étudier et reproduire les œuvres des maîtres, son travail est vite remarqué par des mécènes qui lui achètent ses toiles. A 16 ans, elle vend son premier tableau. Poursuivant son apprentissage aux abattoirs ou à la campagne, les commandes et les prix se multiplient. Le succès est immédiat. Guidée par la persévérance, l’audace, les choix assumés, une volonté hors du commun, la jeune fille connaîtra une histoire admirable et étonnante.
Natacha Henry, née dans l’Eure en 1968, est une essayiste, historienne et journaliste franco-britannique.
Diplômée de la London School of Economics et de Paris IV Sorbonne, elle travaille sur le sexisme dans la culture populaire. Intervenante en collèges, universités et grandes écoles, consultante pour les associations de terrain, elle a publié 15 livres, écrit des films d’animation et obtenu un Fellowship du German Marshall Fund of the United States. Présidente de l’Association des femmes journalistes de 1997 à 1999, elle a fondé en 2005, Gender Company.
Son livre Les Sœurs savantes, Marie Curie et Bronia Dluska est lauréat du Prix Marie Curie 2017, du Prix Marianne 2016 et finaliste du Prix Simone Veil 2015. Elle est également lauréate du Prix Femmes de Lettres. Depuis janvier 2020, elle est consultante internationale auprès du Conseil de l’Europe. Natacha Henri a également collaboré pour plusieurs longs-métrages documentaires sur France Culture.
Rosa Bonheur Labourage nivernais, 1849 - Musée d'Orsay, Paris
Dès les premières pages, Natacha Henry nous plonge au cœur du XIXe siècle. En tant qu’historienne, elle choisit ses mots et organise son texte avec soin, de manière à traduire le contexte et les pensées d’une époque. Le texte rigoureux et simple, a priori destiné aux enfants, séduira très certainement les plus grands.
La technicité des cours donné par Raimond expliquant à sa fille comment bien choisir les couleurs, faire attention aux proportions, respecter les perspectives instruit également les lecteurs. Comme Rosa et Nathalie nous apprenons. Dans l’ atelier des Bonheur ou suivant les visites des jeunes artistes au Louvre, de nombreux et précieux détails agrémentent le récit. A travers les dessins, croquis, esquisses, nous suivons les progrès, attentions et sentiments des deux amies.
La volonté de Rosa est sans faille. Seule sa mission compte. La jeune fille entraîne Nathalie pour des visites en cachette au cabinet d’anatomie comparée au Jardin des Plantes. Déguisée en garçon, elle ira ensuite dans un abattoir pour connaître les muscles, tendons et articulations. Seule au milieu des hommes et dans un endroit qui la dégoûte, Rosa sauvera une jument (qu’elle monte comme un homme et non en amazone, encore une audace pour son temps) pour pouvoir partir à la campagne et voir des animaux dans leur élément naturel en mouvement, bien vivants et heureux. Elle arrivera aussi à obtenir un permis de travestissement (officiellement pour raison médicale) à renouveler tous les six mois pour pouvoir s’habiller en homme. Non pas, par conviction mais pour une raison pratique. Le pantalon est beaucoup plus commode pour peindre, travailler ou partir dessiner en forêt.
L’auteure plante le décors. Elle présente une adolescente culottée, courageuse et tenace, prête à tout pour réaliser son rêve. Le ton est donné. Natacha Henry aiguise notre curiosité en présentant les premières années de cette artiste assez mal connue en France. Proche de Buffalo Bill, Rosa Bonheur a à peine vingt ans lorsque ses toiles s’arrachent Outre-Atlantique. Elle devient tellement célèbre aux États-Unies que des poupées sont fabriquées à son effigie. Artiste incomparable, elle connaît la gloire et la richesse de son vivant. Une autre preuve de sa singularité, Rosa Bonheur a été décorée de la Légion d’honneur le 10 juin 1865 par l’impératrice Eugénie en personne. Elle a 43 ans et devient la première femme artiste a obtenir cette récompense en France. De la même façon, en 1894, elle deviendra la première femme promue au grade d’officier.
Une vie, une œuvre, un destin exceptionnel guidé par la détermination, le travail acharné et le goût de la perfection. Rosa Bonheur est Une Audacieuse, un exemple inspirant que je vous invite à découvrir.
Rosa Bonheur Le Cid, 1879 - Musée du Prado, Madrid
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