Jean d'Agrève ou le récit d'un amour absolu qui a pour décor l'île de Port-Cros à la fin du 19e siècle.

 

A la fois voyageur, orientaliste, diplomate, homme politique, introducteur de la littérature russe en France, le vicomte Eugène-Melchior de Vogüé (1848-1910) est aussi un écrivain. Élu à l’Académie Française en 1888, il y précède son ami Paul Bourget qui n’y sera élu qu’en 1894. À cette époque, celui-ci a découvert Hyères où il achètera une villa – Le Plantier – dans laquelle il séjournera presque chaque hiver jusqu’à sa mort. Melchior de Vogüé, quant à lui, connaît vraisemblablement Hyères et surtout ses îles, depuis les années 1870 et un voyage qui le mène pour la première fois à Florence. Il y séjourne à nouveau en 1896, à Port-Cros – invité par le marquis Charles-Albert Costa de Beauregard – et à Costebelle – très certainement chez son ami Paul Bourget. La région le marque car il profite de son séjour pour y écrire – entre septembre et décembre – et y situer l’action de son roman Jean d’Agrève qui paraît en 1897.

 

Eugène Melchior de Vogüé by NadarEugène-Melchior de Vogüé par Nadar

 

Se déroulant principalement à Port-Cros, Jean d’Agrève raconte l’histoire de l’amour qui unit Jean d’Agrève et Hélène. Jean est un officier de marine d’origine provençale qui en a fini avec les frivolités et la vacuité de la vie mondaine, lassé par une comédie qui l’amusa un temps. Il a quitté la capitale pour s’installer à Port-Cros où il loue une case et se guérit de la « névrose parisienne ». Un jour, à contrecœur, il retourne sur le continent pour assister à une fête et rencontre Hélène, une femme d’une grande beauté, à l’air sibyllin, énigmatique et dans laquelle il reconnaît « l’immémoriale et l’éternelle, celle qu’on attend toujours et qui ne vient jamais. »

 

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 Derrière un rideau de palmiers et d'eucalyptus, le Manoir d'Hélène avec ses tourelles crénelées et sa grâce mystérieuse.

 

Port-Cros, l’île sauvage, « tout droit sorti d’Orient » va alors servir de cadre à la passion des deux amants et devenir le sanctuaire de leur amour. Mais celui-ci, tel celui qui unit Tristan et Iseut ne saurait exister. Car Hélène est déjà mariée ; elle est l’épouse d’un prince russe désargenté, joueur et infidèle, qui la rappelle à ses côtés loin de Jean. Les amants ne se reverront plus. Car Jean est alors rattrapé par l’histoire quand éclate la guerre du Tonkin entre la Chine et la France (1883-1885). Il est envoyé au front tandis qu’Hélène, enfin de retour en France, devient infirmière dans l’hôpital maritime de Port-Cros. Elle y contracte une fièvre qui lui sera fatale tandis que d’Agrève meurt au combat après avoir eu une dernière vision d’Hélène l’appelant.

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 L'opulence de ce paradis terrestre, la pureté de l'air et la splendeur de la lumière défient toute comparaison.

 

À la lecture de l’histoire tragique cet amour absolu entre Jean et Hélène – magnifié par la beauté sauvage de l’île de Port-Cros qui apparaît sous la plume de Melchior de Vogüé comme un paradis à la fois terrestre et originel, un refuge naturel, apaisant et protecteur – on comprend aisément le succès que connut le roman (en témoignent les rééditions dont il bénéficia) malgré un style légèrement suranné et quelques innocentes mièvreries imputables à l’époque.

 

À noter que le roman fut adapté en 1919 au cinéma par René Leprince (1876-1929) avec Léon Mathot (1886-1968) dans le rôle de Jean et Nathalie Kovanko (1899-1967) dans celui d’Hélène.

 

Désormais numérisé, le roman est accessible en ligne ici

 

Jean d'Agrève d'Eugène-Melchior de Vogüé

FP 1161.

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