Parmi les trésors japonais légués à la bibliothèque municipale par la famille de Cuers de Cogolin, figure un recueil de gravures d’un exilé français dans le Japon de l’ère Meiji : Georges Ferdinand Bigot.

Né à Paris en 1860, Bigot, dessinateur surdoué (il intègre les Beaux Arts à douze ans), séduit par le Japonisme qui se propage dans Paris comme "un feu dans un champ de paille entre l'exposition universelle de Paris en 1867 et celle de 1878" , décide en 1882 de partir vivre au Japon. Il y suit des cours de peinture traditionnelle, apprend la langue pour s’intégrer au mieux au pays, joue du shamisen et interprète comme acteur amateur des pièces de théâtre kabuki tandis qu’il donne des cours de dessin et enseigne le français pour gagner de quoi vivre. Il observe, clairement fasciné, la vie quotidienne nippone et multiplie les dessins des Japonais auxquels il se mêle. Depuis 1854, le pays se modernise, renie en quelque sorte ses traditions pour s’occidentaliser et Bigot, moqueur, tire de cette mutation des caricatures puissantes. Il se fait aussi éditeur pour publier ses propres albums de gravures dont Croquis japonais en 1886 qui en trente dessins nous donne à voir ce japon traditionnel qu’il est peiné de voir disparaître peu à peu et qu’il dessine avec simplicité et une certaines nostalgie. Avec le temps, ses critiques vont se faire de plus en plus violentes et il va être inquiété par la censure. Profitant notamment du droit d’extraterritorialité dont bénéficie la concession de Yokohama, il fonde d’ailleurs, en 1887, un journal satirique, Tobae, dans lequel il s’attaque à la société japonaise et à ses velléités d’occidentalisation ainsi qu’aux hommes politiques qu’il caricature férocement. La polémique éclate et il doit dès lors limiter ses attaques sur les résidents étrangers. 

 

 

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Avec la fin des concessions en 1899, son sort est scellé : inquiet pour sa liberté de ton et pour son futur, déçu par l’évolution du pays, il rentre en France. Il s’installe à Bièvres où il meurt en 1927, la même année que Jean Baptiste de Cuers de Cogolin, le négociant dans l’import-export hyérois, qui a ramené de sa vie au Japon une bibliothèque d’ouvrages et de lavis japonais qui seront donnés à la ville d’Hyères dans les années 1930 par sa famille. Parmi ces ouvrages, se trouve donc un des rares exemplaires des Croquis japonais auto-édités par Bigot qui, hormis quelques dessins sur le Japon moderne tel qu’il était alors en train de se constituer, se consacrent à la célébration du Japon traditionnel qui l’avait initialement séduit lors de ses années de formation. L'ouvrage connu manifestement plusieurs éditions jusqu'en 1891, sans que l'on sache combien d'exemplaires furent publiés à chaque fois.

 

Bigot 01

 

 

Bigot fut l’un des rares – tout comme Jean Baptiste Charles de Cuers de Cogolin – a faire le long voyage jusqu’à Yokohama. Il fut en tout cas – et selon toute vraisemblance – le seul artiste français de cette époque à rejoindre le Japon et à y résider pendant presque vingt ans. Le témoignage des Croquis japonais, distinct de son œuvre de caricaturiste par le style et le ton plutôt nostalgique, n’en apparaît que plus précieux.

 

Croquis japonais / Georges Ferdinand Bigot (1886)

Cote I 27

Collections patrimoniales

 

L'exemplaire de la médiathèque a été numérisé et peut être consulté en ligne ici.

 

 

I27 Bigot 025

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